L’intestin, long de par ses propres contractions dans l’embryon

L’intestin doit-il sa forme allongée à la génétique ? Des chercheurs du laboratoire Matière et Systèmes Complexes (MSC, CNRS/Université Paris Diderot) ont cultivé des intestins miniatures et montré, qu’au contraire, l’organe s’étire grâce à ses propres contractions. Sans ce réflexe musculaire, l’intestin se développe en effet en largueur au lieu d’en longueur. Parus dans la revue Journal of the Royal Society: Interface, ces travaux contribuent à mieux comprendre l’influence de phénomènes physiques sur l’embryogenèse.

Un time-lapse sur 6 heures de segments d’intestins oxygénés en permanence. L’agitation est causée par les contractions cycliques des muscles lisses. On voit les intestins s’allonger progressivement: ils poussent, c’est une première en laboratoire.

Lors de l’embryogenèse, la génétique n’est pas le seul architecte du développement de la vie. La recherche découvre progressivement l’importance de paramètres physiques, et en particulier mécaniques, sur l’organisation des cellules pour former un nouvel être. En cultivant des intestins embryonnaires, des chercheurs du laboratoire Matière et Systèmes Complexes (MSC, CNRS/Université Paris Diderot) ont constaté que la forme allongée de cet organe n’est pas directement encodé par le génome de ses cellules.

Dès que l’intestin est différencié, il s’active et se contracte régulièrement sous l’action d’un anneau musculaire. Si ce réflexe sert plus tard à la digestion et au pompage de la nourriture, les biophysiciens du MSC ont montré qu’il induit l’allongement de l’organe via un phénomène d’autopétrissage. Lorsque les chercheurs utilisent un relaxant musculaire, la nicardipine, ou découpent les muscles correspondants, les intestins de culture s’élargissent au lieu de s’allonger. Essentielle pour augmenter la surface d’absorption et compartimenter la digestion, la forme tubulaire de l’intestin découle ainsi directement de sa fonction mécanique digestive. Outre leur éclairage sur l’embryogenèse, ces travaux pourraient ouvrir la voie au traitement de maladies rares, comme le syndrome de l’intestin court, ou à la régénération de segments intestinaux.

Cette synthèse a été aimablement rédigée par Martin Koppe (CNRS)