Avis aux amateurs de bonne chair : les physiciens du laboratoire Matière & Systèmes Complexes (CNRS / Université de Paris) Richard Amedzrovi Agbesi et Nicolas Chevalier dévoilent l’hydrodynamique de votre bol alimentaire dans le numéro d’avril 2022 de Physical Review Fluids.
L’intestin transporte le bol alimentaire en générant des ondes péristaltiques, des contractions de la gaine de muscle qui se propagent à une vitesse de quelques centimètres par seconde le long du tube digestif. Les contractions peuvent être de basse amplitude – des ondelettes – ou au contraire complètement occlusives pour générer un transport plus massif. Les ondes péristaltiques peuvent se propager dans les deux directions et donc s’entrechoquer.
Les physiciens ont étudié expérimentalement et numériquement le flux du bol alimentaire sous l’effet des ondes péristaltiques. Ils ont tout d’abord constaté que la trajectoire d’une particule soumise à une onde n’a rien d’intuitif, elle est d’abord poussée dans le sens de l’onde puis rapidement tirée en sens inverse sous l’effet d’une dépression – on parle de reflux. Ils ont ensuite trouvé que ce reflux est maximal pour une distance entre ondes successives proche de la distance observée physiologiquement chez un grand nombre d’animaux, ce qui pourrait indiquer une optimisation évolutive pour brasser le plus efficacement possible le bol alimentaire. Ils se sont ensuite penché sur le cas des ondes contra-propagatives. Dans ce cas, ils ont démontré qu’une zone de haute pression se forme entre les deux ondes, dont émerge un jet de bol alimentaire à haute vitesse, visualisé expérimentalement (vidéo). Lorsque les deux ondes se rencontrent elles s’annihilent et génèrent en plus un brassage dans la direction radiale. Résultat : les ondes contra-propagatives génèrent 80 fois plus de mélange que des ondes allant dans la même direction !
Ces résultats fondamentaux permettent de mieux comprendre le rôle des différents régimes de contractions de l’intestin sain ou pathologique.